Inédits
7190257 - Post. 18-03-07 - 08:20:55 - Othello
© Photo https://99designs.ca/blog/resources/public-domain-image-resources/ Zach Landers
Toute représentation, adaptation ou reproduction de ce texte en ligne doit faire l'objet d'une demande à l'agent autorisé du traducteur: www.agencegoodwin.com
[extrait]
Entrent Desdemone, Cassio et Emilia.
DESDEMONE
Je vous assure, Cassio,
Que je ferai tout ce qu’il m’est possible
En votre faveur.
EMILIA
Il le faut, par bonté.
Mon mari est fort contrarié,
Comme si ce revers
Était arrivé à lui-même.
DESDEMONE
Iago est honnête.
Comptez sur moi, Cassio:
Je veux que l’amitié
Règne de nouveau
Entre mon mari et vous.
CASSIO
Quoi qu’il advienne de moi,
Vous êtes ma bienfaitrice,
Et vous le resterez toujours.
DESDEMONE
Je le sais. J'apprécie votre gratitude.
Vous avez toujours fait preuve
D’amour et de loyauté
À l’égard d’Othello.
Je vous le redis :
Ce qui vous sépare l'un de l'autre,
N’est, temporairement,
Qu'une affaire de principe.
CASSIO
C'est vrai.
Mais ces principes
Sont parfois tout-puissants
Dépendant de la rigueur
Avec laquelle on les applique.
Il faut souvent un temps énorme
Pour les abolir,
Enorme au point que,
Dégradée et remplacée,
La valeur d'un Cassio
Pourrait être oubliée.
DESDEMONE
Par les liens sacrés de l’amitié,
Je vous jure, devant Emilia,
Que je ferai tout en mon pouvoir.
J’irai jusqu’au bout de mes forces.
Mon seigneur n’aura plus de repos.
Je vais l’apprivoiser
Par un flot incessant de paroles
Que je compte lui servir,
Matin, midi et soir
De telle façon que ma requête
Occupera son esprit tout entier
Autant qu’il devra
Supporter des nuits blanches
À entendre le nom de Cassio.
Rien, sinon que la mort,
Ne pourra m’empêcher
De défendre notre cause.
Entrent Othello et Iago.
EMILIA
Voici votre mari.
CASSIO
Je vous laisse, madame.
DESDEMONE
Restez plutôt;
Je veux lui parler devant vous.
CASSIO
Une autre fois, je vous prie.
J'ai honte déjà,
Et je ne peux rien
Pour moi-même.
Il sort.
IAGO
Ah - Je n’aime pas cela.
OTHELLO
Que dis-tu ?
IAGO
Rien, mon seigneur.
Non - ... je ne sais pas.
OTHELLO
Était-ce bien Cassio
Qui était avec ma femme ?
IAGO
Cassio ?
J’ai peine à croire
Qu’il se serait esquivé
Avec un air aussi coupable
En vous voyant.
OTHELLO
Il me semble que c’était lui.
DESDEMONE
Je parlais à l’instant, mon seigneur
Avec un homme
Que votre disgrâce
A rendu malheureux.
OTHELLO
Qui donc ?
DESDEMONE
Votre lieutenant Cassio.
Pour peu que j’aie le don
De vous émouvoir,
Acceptez sur-le-champ son repentir,
Et donnez lui votre pardon.
Si cet homme a menti
En disant ses regrets
Dans l’amour qu’il vous porte,
J’accepterais qu’on doute
De ma propre sincérité.
Reprenez-le, je vous prie.
OTHELLO
C’est donc lui qui vient de sortir ?
DESDEMONE
Oui, sur ma foi,
Dans une si grande humiliation
Qu’il m’a laissé de son chagrin
Pour que je souffre avec lui.
Amour, rappelez-le.
OTHELLO
Pas maintenant, chère Desdemone.
Plus tard.
DESDEMONE
Bientôt ?
OTHELLO
Le plus vite possible,
Comme tu le souhaites.
DESDEMONE
Avant le souper ?
OTHELLO
Non. Pas ce soir.
DESDEMONE
Demain, alors, au dîner ?
OTHELLO
Demain je dîne avec des officiers.
DESDEMONE
Alors demain soir? Alors mardi,
Mardi matin, ou mardi soir?
Mercredi sinon, mercredi matin,
Mais pas plus tard.
Dites-moi au moins quel jour!
Ses regrets sont sincères
Pour un crime qui,
Entre vous et moi,
N’aurait pas eu d’incidence
En d’autre temps.
Quand reviendra-t-il?
Othello, dites-le-moi.
Je cherche en vain
Quelle serait la requête
Qui, venant de vous,
M’obligerait à tant d’hésitation.
Cet ami, Cassio,
Qui vous accompagnait
Quand vous me courtisiez,
Et qui prenait votre défense
Chaque fois que je vous dénigrais,
J’ai peine à croire
Qu’il faille à ce point m’évertuer
Pour le défendre à présent.
Par la Vierge Marie,
Je ferais l’impossible.
OTHELLO
Assez, je te prie.
Qu’il vienne quand il voudra.
Je ne veux rien te refuser.
DESDEMONE
Je ne vous l’ai pas demandé
Comme une faveur.
Aussi bien vous implorer
De mettre vos gants,
De bien vous nourrir
Et de veiller sur vous
De façon convenable.
Le jour où je devrai mettre
Votre amour à l’épreuve
Que ce soit par une requête
De plus grande envergure,
Périlleuse à exécuter,
Et terrible à exaucer.
OTHELLO
Je ne veux rien te refuser.
Mais je te prie maintenant
De me laisser seul.
DESDEMONE
Et si je m’y opposais ?
Que non. Adieu, mon seigneur.
OTHELLO
Adieu, ma Desdemone.
William Shakespeare, Othello, le Maure de Venise, Acte III sc. III
La traduction (version numérique intégrale) d'Othello, le Maure de Venise de Shakespeare par Normand Chaurette est disponible chez Adel.
© nchaurette 2012 - http://www.normandchaurette.com/textes.html
7190257 - Post. 18-03-07 - 08:20:55 - Othello
© Photo https://99designs.ca/blog/resources/public-domain-image-resources/ Zach Landers
Toute représentation, adaptation ou reproduction de ce texte en ligne doit faire l'objet d'une demande à l'agent autorisé du traducteur: www.agencegoodwin.com
[extrait]
Entrent Desdemone, Cassio et Emilia.
DESDEMONE
Je vous assure, Cassio,
Que je ferai tout ce qu’il m’est possible
En votre faveur.
EMILIA
Il le faut, par bonté.
Mon mari est fort contrarié,
Comme si ce revers
Était arrivé à lui-même.
DESDEMONE
Iago est honnête.
Comptez sur moi, Cassio:
Je veux que l’amitié
Règne de nouveau
Entre mon mari et vous.
CASSIO
Quoi qu’il advienne de moi,
Vous êtes ma bienfaitrice,
Et vous le resterez toujours.
DESDEMONE
Je le sais. J'apprécie votre gratitude.
Vous avez toujours fait preuve
D’amour et de loyauté
À l’égard d’Othello.
Je vous le redis :
Ce qui vous sépare l'un de l'autre,
N’est, temporairement,
Qu'une affaire de principe.
CASSIO
C'est vrai.
Mais ces principes
Sont parfois tout-puissants
Dépendant de la rigueur
Avec laquelle on les applique.
Il faut souvent un temps énorme
Pour les abolir,
Enorme au point que,
Dégradée et remplacée,
La valeur d'un Cassio
Pourrait être oubliée.
DESDEMONE
Par les liens sacrés de l’amitié,
Je vous jure, devant Emilia,
Que je ferai tout en mon pouvoir.
J’irai jusqu’au bout de mes forces.
Mon seigneur n’aura plus de repos.
Je vais l’apprivoiser
Par un flot incessant de paroles
Que je compte lui servir,
Matin, midi et soir
De telle façon que ma requête
Occupera son esprit tout entier
Autant qu’il devra
Supporter des nuits blanches
À entendre le nom de Cassio.
Rien, sinon que la mort,
Ne pourra m’empêcher
De défendre notre cause.
Entrent Othello et Iago.
EMILIA
Voici votre mari.
CASSIO
Je vous laisse, madame.
DESDEMONE
Restez plutôt;
Je veux lui parler devant vous.
CASSIO
Une autre fois, je vous prie.
J'ai honte déjà,
Et je ne peux rien
Pour moi-même.
Il sort.
IAGO
Ah - Je n’aime pas cela.
OTHELLO
Que dis-tu ?
IAGO
Rien, mon seigneur.
Non - ... je ne sais pas.
OTHELLO
Était-ce bien Cassio
Qui était avec ma femme ?
IAGO
Cassio ?
J’ai peine à croire
Qu’il se serait esquivé
Avec un air aussi coupable
En vous voyant.
OTHELLO
Il me semble que c’était lui.
DESDEMONE
Je parlais à l’instant, mon seigneur
Avec un homme
Que votre disgrâce
A rendu malheureux.
OTHELLO
Qui donc ?
DESDEMONE
Votre lieutenant Cassio.
Pour peu que j’aie le don
De vous émouvoir,
Acceptez sur-le-champ son repentir,
Et donnez lui votre pardon.
Si cet homme a menti
En disant ses regrets
Dans l’amour qu’il vous porte,
J’accepterais qu’on doute
De ma propre sincérité.
Reprenez-le, je vous prie.
OTHELLO
C’est donc lui qui vient de sortir ?
DESDEMONE
Oui, sur ma foi,
Dans une si grande humiliation
Qu’il m’a laissé de son chagrin
Pour que je souffre avec lui.
Amour, rappelez-le.
OTHELLO
Pas maintenant, chère Desdemone.
Plus tard.
DESDEMONE
Bientôt ?
OTHELLO
Le plus vite possible,
Comme tu le souhaites.
DESDEMONE
Avant le souper ?
OTHELLO
Non. Pas ce soir.
DESDEMONE
Demain, alors, au dîner ?
OTHELLO
Demain je dîne avec des officiers.
DESDEMONE
Alors demain soir? Alors mardi,
Mardi matin, ou mardi soir?
Mercredi sinon, mercredi matin,
Mais pas plus tard.
Dites-moi au moins quel jour!
Ses regrets sont sincères
Pour un crime qui,
Entre vous et moi,
N’aurait pas eu d’incidence
En d’autre temps.
Quand reviendra-t-il?
Othello, dites-le-moi.
Je cherche en vain
Quelle serait la requête
Qui, venant de vous,
M’obligerait à tant d’hésitation.
Cet ami, Cassio,
Qui vous accompagnait
Quand vous me courtisiez,
Et qui prenait votre défense
Chaque fois que je vous dénigrais,
J’ai peine à croire
Qu’il faille à ce point m’évertuer
Pour le défendre à présent.
Par la Vierge Marie,
Je ferais l’impossible.
OTHELLO
Assez, je te prie.
Qu’il vienne quand il voudra.
Je ne veux rien te refuser.
DESDEMONE
Je ne vous l’ai pas demandé
Comme une faveur.
Aussi bien vous implorer
De mettre vos gants,
De bien vous nourrir
Et de veiller sur vous
De façon convenable.
Le jour où je devrai mettre
Votre amour à l’épreuve
Que ce soit par une requête
De plus grande envergure,
Périlleuse à exécuter,
Et terrible à exaucer.
OTHELLO
Je ne veux rien te refuser.
Mais je te prie maintenant
De me laisser seul.
DESDEMONE
Et si je m’y opposais ?
Que non. Adieu, mon seigneur.
OTHELLO
Adieu, ma Desdemone.
William Shakespeare, Othello, le Maure de Venise, Acte III sc. III
La traduction (version numérique intégrale) d'Othello, le Maure de Venise de Shakespeare par Normand Chaurette est disponible chez Adel.
© nchaurette 2012 - http://www.normandchaurette.com/textes.html
Inédits
7190257 - Post. 18-03-07 - 08:20:55 - Othello
© Photo https://99designs.ca/blog/resources/public-domain-image-resources/ Zach Landers
Toute représentation, adaptation ou reproduction de ce texte en ligne doit faire l'objet d'une demande à l'agent autorisé du traducteur: www.agencegoodwin.com
[extrait]
Entrent Desdemone, Cassio et Emilia.
DESDEMONE
Je vous assure, Cassio,
Que je ferai tout ce qu’il m’est possible
En votre faveur.
EMILIA
Il le faut, par bonté.
Mon mari est fort contrarié,
Comme si ce revers
Était arrivé à lui-même.
DESDEMONE
Iago est honnête.
Comptez sur moi, Cassio:
Je veux que l’amitié
Règne de nouveau
Entre mon mari et vous.
CASSIO
Quoi qu’il advienne de moi,
Vous êtes ma bienfaitrice,
Et vous le resterez toujours.
DESDEMONE
Je le sais. J'apprécie votre gratitude.
Vous avez toujours fait preuve
D’amour et de loyauté
À l’égard d’Othello.
Je vous le redis :
Ce qui vous sépare l'un de l'autre,
N’est, temporairement,
Qu'une affaire de principe.
CASSIO
C'est vrai.
Mais ces principes
Sont parfois tout-puissants
Dépendant de la rigueur
Avec laquelle on les applique.
Il faut souvent un temps énorme
Pour les abolir,
Enorme au point que,
Dégradée et remplacée,
La valeur d'un Cassio
Pourrait être oubliée.
DESDEMONE
Par les liens sacrés de l’amitié,
Je vous jure, devant Emilia,
Que je ferai tout en mon pouvoir.
J’irai jusqu’au bout de mes forces.
Mon seigneur n’aura plus de repos.
Je vais l’apprivoiser
Par un flot incessant de paroles
Que je compte lui servir,
Matin, midi et soir
De telle façon que ma requête
Occupera son esprit tout entier
Autant qu’il devra
Supporter des nuits blanches
À entendre le nom de Cassio.
Rien, sinon que la mort,
Ne pourra m’empêcher
De défendre notre cause.
Entrent Othello et Iago.
EMILIA
Voici votre mari.
CASSIO
Je vous laisse, madame.
DESDEMONE
Restez plutôt;
Je veux lui parler devant vous.
CASSIO
Une autre fois, je vous prie.
J'ai honte déjà,
Et je ne peux rien
Pour moi-même.
Il sort.
IAGO
Ah - Je n’aime pas cela.
OTHELLO
Que dis-tu ?
IAGO
Rien, mon seigneur.
Non - ... je ne sais pas.
OTHELLO
Était-ce bien Cassio
Qui était avec ma femme ?
IAGO
Cassio ?
J’ai peine à croire
Qu’il se serait esquivé
Avec un air aussi coupable
En vous voyant.
OTHELLO
Il me semble que c’était lui.
DESDEMONE
Je parlais à l’instant, mon seigneur
Avec un homme
Que votre disgrâce
A rendu malheureux.
OTHELLO
Qui donc ?
DESDEMONE
Votre lieutenant Cassio.
Pour peu que j’aie le don
De vous émouvoir,
Acceptez sur-le-champ son repentir,
Et donnez lui votre pardon.
Si cet homme a menti
En disant ses regrets
Dans l’amour qu’il vous porte,
J’accepterais qu’on doute
De ma propre sincérité.
Reprenez-le, je vous prie.
OTHELLO
C’est donc lui qui vient de sortir ?
DESDEMONE
Oui, sur ma foi,
Dans une si grande humiliation
Qu’il m’a laissé de son chagrin
Pour que je souffre avec lui.
Amour, rappelez-le.
OTHELLO
Pas maintenant, chère Desdemone.
Plus tard.
DESDEMONE
Bientôt ?
OTHELLO
Le plus vite possible,
Comme tu le souhaites.
DESDEMONE
Avant le souper ?
OTHELLO
Non. Pas ce soir.
DESDEMONE
Demain, alors, au dîner ?
OTHELLO
Demain je dîne avec des officiers.
DESDEMONE
Alors demain soir? Alors mardi,
Mardi matin, ou mardi soir?
Mercredi sinon, mercredi matin,
Mais pas plus tard.
Dites-moi au moins quel jour!
Ses regrets sont sincères
Pour un crime qui,
Entre vous et moi,
N’aurait pas eu d’incidence
En d’autre temps.
Quand reviendra-t-il?
Othello, dites-le-moi.
Je cherche en vain
Quelle serait la requête
Qui, venant de vous,
M’obligerait à tant d’hésitation.
Cet ami, Cassio,
Qui vous accompagnait
Quand vous me courtisiez,
Et qui prenait votre défense
Chaque fois que je vous dénigrais,
J’ai peine à croire
Qu’il faille à ce point m’évertuer
Pour le défendre à présent.
Par la Vierge Marie,
Je ferais l’impossible.
OTHELLO
Assez, je te prie.
Qu’il vienne quand il voudra.
Je ne veux rien te refuser.
DESDEMONE
Je ne vous l’ai pas demandé
Comme une faveur.
Aussi bien vous implorer
De mettre vos gants,
De bien vous nourrir
Et de veiller sur vous
De façon convenable.
Le jour où je devrai mettre
Votre amour à l’épreuve
Que ce soit par une requête
De plus grande envergure,
Périlleuse à exécuter,
Et terrible à exaucer.
OTHELLO
Je ne veux rien te refuser.
Mais je te prie maintenant
De me laisser seul.
DESDEMONE
Et si je m’y opposais ?
Que non. Adieu, mon seigneur.
OTHELLO
Adieu, ma Desdemone.
William Shakespeare, Othello, le Maure de Venise, Acte III sc. III
La traduction (version numérique intégrale) d'Othello, le Maure de Venise de Shakespeare par Normand Chaurette est disponible chez
© nchaurette 2012 - http://www.normandchaurette.com/textes.html