Inédits
7190262 - Post. 18-03-07 - 07:17:40 - Tempête
© Photo DH/Montage Digital 1997 Bryce (Bryce 7 Pro) Paysage virtuel - Sorrow
Toute représentation, adaptation ou reproduction de ce texte en ligne doit faire l'objet d'une demande à l'agent autorisé du traducteur: www.agencegoodwin.com
La Tempête
de William Shakespeare
Traduction* N.Chaurette 2004
La Scène - une île inhabitée.
Personnages
Alonso, roi de Naples
Sébastien, son frère
Prospéro, duc légitime de Milan
Antonio, son frère, duc usurpateur de Milan
Ferdinand, fils du roi de Naples
Gonzalo, un honnête conseiller
Caliban, esclave primitif et difforme
Trinculo, un bouffon
Stéphano, un sommelier ivrogne
Miranda, fille de Prospéro
Ariel, esprit des airs
Trois esprits: Iris, Cérès, Junon
* "The Tempest, in The Works of William Shakespeare according to their first Originall" - Fac simile edition prepared by Helge Kokeritz, London, Geoffrey Cumberlege, Oxford University Press. (1er folio, 1623).
[extrait]
PROSPÉRO, à Ferdinand
Si je t'ai éprouvé
Avec tant d'austérité,
Voici ta récompense:
Je te donne le tiers
De moi-même.
Je t'ai infligé
Autant de fois les peines
Qu'il te fallait d'épreuves
Pour mériter cet amour.
Ferdinand, tu verras
Que rien ne peut surpasser
La valeur de cette enfant.
FERDINAND.
Je le croirais
Contre un oracle.
PROSPÉRO.
Le ciel en est témoin:
Comme un riche trésor,
Je te la donne.
Aie bien soin cependant
D'honorer sa virginité
Jusqu'à ce que les rites
Et les cérémonies
Vous consacrent
En tant qu'époux.
Car au lieu d'une rosée
Sur votre union fertile,
Des ronces d’amertume
Allongeraient leurs tiges
Dans des draps
Qui vous feraient horreur.
FERDINAND.
Rien - ni la nuit obscure
Ni l'occasion d'un lieu
Ou d'une tentation propice,
Ne saurait m'inciter
À profaner la pureté
De notre amour.
Ce serait transformer
La clarté de ce jour parfait
En une éternelle
Et terrible noirceur.
PROSPÉRO.
Voilà qui est dit sagement.
Assieds-toi -
Parle-lui; elle t'appartient.
Ariel!
Valeureux serviteur!
Viens, Ariel.
ARIEL.
Maître puissant,
Pour te servir, me voici.
PROSPÉRO.
Tu t’es fort bien acquitté
De ta dernière tâche.
Je veux t’employer
A un nouvel exploit.
ARIEL.
Maître, ma liberté.
PROSPÉRO.
Va convoquer les esprits
Je te donne tout pouvoir sur eux.
Je veux les voir à l’instant
Émerveiller les yeux
De ces deux tourtereaux
Par un déploiement d’apparences.
ARIEL.
Tu dis "Vas-y"
Tu dis "Va-t-en"
Plus vite encore
Que va le temps
Quand moi je vais
Le vent je suis.
Mon maître - m'aimes-tu?
Dis-moi que oui.
PROSPÉRO.
De tout mon cœur,
Fugace Ariel.
Fais ce que je te demande! Vite !
ARIEL.
Plus vite encore
Que va le temps.
PROSPÉRO.
Que les présences
De l’invisible
Descendent parmi nous,
Comme s’il était naturel
Qu’avec nos yeux
Nous puissions les voir.
ARIEL.
Maître, les voici.
Musique ténue.
Spectacle.
FERDINAND.
Quels délices à nos sens
Nous pouvons voir
Et entendre!
Est-ce bien cela
Qu'on appelle des esprits?
PROSPÉRO.
Ce sont là des esprits
Évadés de leurs sphères
Convoqués par ma science
Selon le goût du jour.
FERDINAND.
Je veux vivre à jamais
Dans ce lieu -
Auprès d'un père
Capable de telles merveilles.
PROSPÉRO.
Et d'ardeur - mais silence.
Quelque chose va se produire.
Pas un mot -
Pour ne pas rompre le charme.
Prospéro s'assombrit et parle. Une rumeur confuse et pesante altère l'atmosphère, et tout disparaît tristement.
Je sens peser sur moi
Le poids d’une menace terrible.
Conspiration – j’oubliais.
Je vous remercie,
Bien - à présent
Évanescence
Allez-vous-en.
FERDINAND.
Étrange: votre père
Semble être la proie
D'une passion violente.
MIRANDA.
Jamais encore je ne l'ai vu
En un si terrible émoi.
PROSPÉRO.
Vous paraissez troublé
Mon enfant;
Comme si le chagrin
Assiégeait votre cœur.
Allons, rassurez-vous.
Le jeu tire à sa fin.
Ces acteurs
Comme je l'ai dit,
Étaient tous des esprits.
Or ils ont déserté
L'espace subtil
Ainsi que toute chose
Sans corps et sans assise
Qui s'offre à nos regards.
Ces palais grandioses
Ces remparts auréolés de brumes,
Désassemblés du globe,
Légers comme un oiseau.
Fulgurantes visions
De tout ce que nous sommes
Et qui s'évanouiront
Comme s'est dissolu
Ce théâtre sans corps
Sans rideau, sans écho.
Nous sommes fabriqués
De l'étoffe des rêves;
Notre vie n'est qu'un souffle
Dans un vaste sommeil.
Pardonnez mon humeur
Et ma mélancolie.
Ne vous inquiétez pas.
Je suis vieux, je divague.
Retirez-vous -
Moi j'irai par là
Recouvrer mes idées.
MIRANDA.
Puisse la paix
Vous accompagner.
Ils sortent.
William Shakespeare, La Tempête, Acte IV sc. I
La traduction (version numérique intégrale) de La Tempête de Shakespeare par Normand Chaurette est disponible chez Adel.
© nchaurette 2012 - http://www.normandchaurette.com/textes.html
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La Tempête
de William Shakespeare
Traduction* N.Chaurette 2004
La Scène - une île inhabitée.
Personnages
Alonso, roi de Naples
Sébastien, son frère
Prospéro, duc légitime de Milan
Antonio, son frère, duc usurpateur de Milan
Ferdinand, fils du roi de Naples
Gonzalo, un honnête conseiller
Caliban, esclave primitif et difforme
Trinculo, un bouffon
Stéphano, un sommelier ivrogne
Miranda, fille de Prospéro
Ariel, esprit des airs
Trois esprits: Iris, Cérès, Junon
* "The Tempest, in The Works of William Shakespeare according to their first Originall" - Fac simile edition prepared by Helge Kokeritz, London, Geoffrey Cumberlege, Oxford University Press. (1er folio, 1623).
[extrait]
PROSPÉRO, à Ferdinand
Si je t'ai éprouvé
Avec tant d'austérité,
Voici ta récompense:
Je te donne le tiers
De moi-même.
Je t'ai infligé
Autant de fois les peines
Qu'il te fallait d'épreuves
Pour mériter cet amour.
Ferdinand, tu verras
Que rien ne peut surpasser
La valeur de cette enfant.
FERDINAND.
Je le croirais
Contre un oracle.
PROSPÉRO.
Le ciel en est témoin:
Comme un riche trésor,
Je te la donne.
Aie bien soin cependant
D'honorer sa virginité
Jusqu'à ce que les rites
Et les cérémonies
Vous consacrent
En tant qu'époux.
Car au lieu d'une rosée
Sur votre union fertile,
Des ronces d’amertume
Allongeraient leurs tiges
Dans des draps
Qui vous feraient horreur.
FERDINAND.
Rien - ni la nuit obscure
Ni l'occasion d'un lieu
Ou d'une tentation propice,
Ne saurait m'inciter
À profaner la pureté
De notre amour.
Ce serait transformer
La clarté de ce jour parfait
En une éternelle
Et terrible noirceur.
PROSPÉRO.
Voilà qui est dit sagement.
Assieds-toi -
Parle-lui; elle t'appartient.
Ariel!
Valeureux serviteur!
Viens, Ariel.
ARIEL.
Maître puissant,
Pour te servir, me voici.
PROSPÉRO.
Tu t’es fort bien acquitté
De ta dernière tâche.
Je veux t’employer
A un nouvel exploit.
ARIEL.
Maître, ma liberté.
PROSPÉRO.
Va convoquer les esprits
Je te donne tout pouvoir sur eux.
Je veux les voir à l’instant
Émerveiller les yeux
De ces deux tourtereaux
Par un déploiement d’apparences.
ARIEL.
Tu dis "Vas-y"
Tu dis "Va-t-en"
Plus vite encore
Que va le temps
Quand moi je vais
Le vent je suis.
Mon maître - m'aimes-tu?
Dis-moi que oui.
PROSPÉRO.
De tout mon cœur,
Fugace Ariel.
Fais ce que je te demande! Vite !
ARIEL.
Plus vite encore
Que va le temps.
PROSPÉRO.
Que les présences
De l’invisible
Descendent parmi nous,
Comme s’il était naturel
Qu’avec nos yeux
Nous puissions les voir.
ARIEL.
Maître, les voici.
Musique ténue.
Spectacle.
FERDINAND.
Quels délices à nos sens
Nous pouvons voir
Et entendre!
Est-ce bien cela
Qu'on appelle des esprits?
PROSPÉRO.
Ce sont là des esprits
Évadés de leurs sphères
Convoqués par ma science
Selon le goût du jour.
FERDINAND.
Je veux vivre à jamais
Dans ce lieu -
Auprès d'un père
Capable de telles merveilles.
PROSPÉRO.
Et d'ardeur - mais silence.
Quelque chose va se produire.
Pas un mot -
Pour ne pas rompre le charme.
Prospéro s'assombrit et parle. Une rumeur confuse et pesante altère l'atmosphère, et tout disparaît tristement.
Je sens peser sur moi
Le poids d’une menace terrible.
Conspiration – j’oubliais.
Je vous remercie,
Bien - à présent
Évanescence
Allez-vous-en.
FERDINAND.
Étrange: votre père
Semble être la proie
D'une passion violente.
MIRANDA.
Jamais encore je ne l'ai vu
En un si terrible émoi.
PROSPÉRO.
Vous paraissez troublé
Mon enfant;
Comme si le chagrin
Assiégeait votre cœur.
Allons, rassurez-vous.
Le jeu tire à sa fin.
Ces acteurs
Comme je l'ai dit,
Étaient tous des esprits.
Or ils ont déserté
L'espace subtil
Ainsi que toute chose
Sans corps et sans assise
Qui s'offre à nos regards.
Ces palais grandioses
Ces remparts auréolés de brumes,
Désassemblés du globe,
Légers comme un oiseau.
Fulgurantes visions
De tout ce que nous sommes
Et qui s'évanouiront
Comme s'est dissolu
Ce théâtre sans corps
Sans rideau, sans écho.
Nous sommes fabriqués
De l'étoffe des rêves;
Notre vie n'est qu'un souffle
Dans un vaste sommeil.
Pardonnez mon humeur
Et ma mélancolie.
Ne vous inquiétez pas.
Je suis vieux, je divague.
Retirez-vous -
Moi j'irai par là
Recouvrer mes idées.
MIRANDA.
Puisse la paix
Vous accompagner.
Ils sortent.
William Shakespeare, La Tempête, Acte IV sc. I
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Toute représentation, adaptation ou reproduction de ce texte en ligne doit faire l'objet d'une demande à l'agent autorisé du traducteur: www.agencegoodwin.com
La Tempête
de William Shakespeare
Traduction* N.Chaurette 2004
La Scène - une île inhabitée.
Personnages
Alonso, roi de Naples
Sébastien, son frère
Prospéro, duc légitime de Milan
Antonio, son frère, duc usurpateur de Milan
Ferdinand, fils du roi de Naples
Gonzalo, un honnête conseiller
Caliban, esclave primitif et difforme
Trinculo, un bouffon
Stéphano, un sommelier ivrogne
Miranda, fille de Prospéro
Ariel, esprit des airs
Trois esprits: Iris, Cérès, Junon
* "The Tempest, in The Works of William Shakespeare according to their first Originall" - Fac simile edition prepared by Helge Kokeritz, London, Geoffrey Cumberlege, Oxford University Press. (1er folio, 1623).
[extrait]
PROSPÉRO, à Ferdinand
Si je t'ai éprouvé
Avec tant d'austérité,
Voici ta récompense:
Je te donne le tiers
De moi-même.
Je t'ai infligé
Autant de fois les peines
Qu'il te fallait d'épreuves
Pour mériter cet amour.
Ferdinand, tu verras
Que rien ne peut surpasser
La valeur de cette enfant.
FERDINAND.
Je le croirais
Contre un oracle.
PROSPÉRO.
Le ciel en est témoin:
Comme un riche trésor,
Je te la donne.
Aie bien soin cependant
D'honorer sa virginité
Jusqu'à ce que les rites
Et les cérémonies
Vous consacrent
En tant qu'époux.
Car au lieu d'une rosée
Sur votre union fertile,
Des ronces d’amertume
Allongeraient leurs tiges
Dans des draps
Qui vous feraient horreur.
FERDINAND.
Rien - ni la nuit obscure
Ni l'occasion d'un lieu
Ou d'une tentation propice,
Ne saurait m'inciter
À profaner la pureté
De notre amour.
Ce serait transformer
La clarté de ce jour parfait
En une éternelle
Et terrible noirceur.
PROSPÉRO.
Voilà qui est dit sagement.
Assieds-toi -
Parle-lui; elle t'appartient.
Ariel!
Valeureux serviteur!
Viens, Ariel.
ARIEL.
Maître puissant,
Pour te servir, me voici.
PROSPÉRO.
Tu t’es fort bien acquitté
De ta dernière tâche.
Je veux t’employer
A un nouvel exploit.
ARIEL.
Maître, ma liberté.
PROSPÉRO.
Va convoquer les esprits
Je te donne tout pouvoir sur eux.
Je veux les voir à l’instant
Émerveiller les yeux
De ces deux tourtereaux
Par un déploiement d’apparences.
ARIEL.
Tu dis "Vas-y"
Tu dis "Va-t-en"
Plus vite encore
Que va le temps
Quand moi je vais
Le vent je suis.
Mon maître - m'aimes-tu?
Dis-moi que oui.
PROSPÉRO.
De tout mon cœur,
Fugace Ariel.
Fais ce que je te demande! Vite !
ARIEL.
Plus vite encore
Que va le temps.
PROSPÉRO.
Que les présences
De l’invisible
Descendent parmi nous,
Comme s’il était naturel
Qu’avec nos yeux
Nous puissions les voir.
ARIEL.
Maître, les voici.
Musique ténue.
Spectacle.
FERDINAND.
Quels délices à nos sens
Nous pouvons voir
Et entendre!
Est-ce bien cela
Qu'on appelle des esprits?
PROSPÉRO.
Ce sont là des esprits
Évadés de leurs sphères
Convoqués par ma science
Selon le goût du jour.
FERDINAND.
Je veux vivre à jamais
Dans ce lieu -
Auprès d'un père
Capable de telles merveilles.
PROSPÉRO.
Et d'ardeur - mais silence.
Quelque chose va se produire.
Pas un mot -
Pour ne pas rompre le charme.
Prospéro s'assombrit et parle. Une rumeur confuse et pesante altère l'atmosphère, et tout disparaît tristement.
Je sens peser sur moi
Le poids d’une menace terrible.
Conspiration – j’oubliais.
Je vous remercie,
Bien - à présent
Évanescence
Allez-vous-en.
FERDINAND.
Étrange: votre père
Semble être la proie
D'une passion violente.
MIRANDA.
Jamais encore je ne l'ai vu
En un si terrible émoi.
PROSPÉRO.
Vous paraissez troublé
Mon enfant;
Comme si le chagrin
Assiégeait votre cœur.
Allons, rassurez-vous.
Le jeu tire à sa fin.
Ces acteurs
Comme je l'ai dit,
Étaient tous des esprits.
Or ils ont déserté
L'espace subtil
Ainsi que toute chose
Sans corps et sans assise
Qui s'offre à nos regards.
Ces palais grandioses
Ces remparts auréolés de brumes,
Désassemblés du globe,
Légers comme un oiseau.
Fulgurantes visions
De tout ce que nous sommes
Et qui s'évanouiront
Comme s'est dissolu
Ce théâtre sans corps
Sans rideau, sans écho.
Nous sommes fabriqués
De l'étoffe des rêves;
Notre vie n'est qu'un souffle
Dans un vaste sommeil.
Pardonnez mon humeur
Et ma mélancolie.
Ne vous inquiétez pas.
Je suis vieux, je divague.
Retirez-vous -
Moi j'irai par là
Recouvrer mes idées.
MIRANDA.
Puisse la paix
Vous accompagner.
Ils sortent.
William Shakespeare, La Tempête, Acte IV sc. I
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